La réponse
On écrit : Un ou une après-midi. Les deux formes sont admises. C’est un nom que l’on peut employer aux deux genres, masculin ou au féminin. L’Académie française préfère l’emploi du masculin depuis la 7e édition (1878) de son Dictionnaire. Elle préférait auparavant le féminin, et précise dans son édition actuelle (la 9e) : « on doit préférer le masculin ». Le masculin est plus courant depuis la première moitié du XXe siècle (cf. les résultats donnés par l’outil google n-gram), mais il ne domine pas l’usage sans partage : on entend souvent le féminin « une après-midi ». Les auteurs célèbres emploient les deux genres (voir ci-dessous). Le Littré l’enregistre comme nom féminin, mais il ajoute en remarque qu’il peut être des deux genres, parce que ce terme peut sous-entendre ou partie de la journée (un « après ») ou une durée (comme « une matinée » ou « une soirée »).
Selon l’orthographe traditionnelle, ce terme est invariable au pluriel (en savoir plus ici). Parmi les propositions de rectification de l’orthographique publiées en 1990 figurait la possibilité d’écrire « après-midis » avec le « s » qui marque le pluriel :
- Nouvelle orthographe : j’aime les après-midis que nous passons à la plage.
Cependant, on ne peut pas écrire « m » mais « mon » après-midi pour une raison d’euphonie (pour l’harmonie de la prononciation). En effet, l’emploi de « ma » rendrait la prononciation de la phrase difficile à cause de l’hiatus (la rencontre de deux voyelles).
À lire ici : quel est le féminin d’auteur ? Auteure ? Autrice ?
Exemples avec « après-midi » au masculin
- Je me promenais aux Champs-Élysées par un beau jour de printemps. C’était un de ces après-midi tièdes qui remuent en nous des joies secrètes, qui nous allument les yeux et versent sur nous un tumultueux bonheur de vivre. (Maupassant, Contes, Un Sage)
- Le docteur, un après-midi, vint s’y faire couper les cheveux. (Flaubert, Bouvard et Pécuchet)
- Mais si les acteurs me préoccupaient ainsi, si la vue de Maubant sortant un après-midi du Théâtre-Français m’avait causé le saisissement et les souffrances de l’amour […] Proust, À la recherche du temps perdu)
- L’après-midi était beau. Cependant. le pavé était gras. les gens rares et pressés encore. C’étaient d’abord des familles en promenade. deux petits garçons en costume marin. (Camus, L’Étranger)
Exemples au féminin
- Ah ! ces homards de digestion si lente, dont nous souffrîmes, Simon et moi, durant les longues après-midi de soleil, en face de l’Océan qui fait mal aux yeux ! (Barrès, Un Homme libre, cité par le TLFi)
- Deux mois plus tard, par une après-midi grise et douce de novembre, MmeCaroline monta à la salle des épures, tout de suite après le déjeuner, pour se mettre au travail. (Zola, L’Argent)
- Et elle accourait, cette après-midi-là, avec le besoin fiévreux de hâter les choses. (Zola, Le Docteur Pascal)
- Sa femme, plus âgée que lui, était une créole toujours belle et lente comme une après-midi de fin juin. (Giono, Un Roi sans divertissement)
Concernant la prétendue « réforme de l’orthographe de 1990 », voici le billet écrit par Jean-Pierre Colignon en 2016 :
« … En préambule, l’Académie affirme qu’ « elle n’est pas à l’origine de ce qui est désigné sous le nom de « réforme de l’orthographe », dont la presse se fait l’écho depuis plusieurs jours et qui devrait être appliquée dans les programmes scolaires à compter de la prochaine rentrée ».
L’Académie confirme ce que j’ai dit : le texte n’a, en 1991, été publié que dans la partie « documents administratifs » du Journal officiel. « La Compagnie a rappelé à cette occasion son attachement au principe selon lequel doivent être exclues toute réforme et même toute simplification de l’orthographe. Ce principe est conforme à sa position constante : hostile à toute réforme visant à modifier autoritairement l’usage, l’Académie n’a jamais été pour autant fermée à des ajustements appelés par les évolutions de la langue, et que les différentes éditions de son Dictionnaire se sont attachées à refléter. »
L’Académie résume sa position, en déclarant, dans la conclusion, qu’ « elle s’est proposé, selon une procédure qu’elle a déjà suivie à plusieurs reprises, de juger à terme des graphies que l’usage, législateur suprême, aura retenues et de confirmer ou infirmer les modifications proposées ».
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Les Quarante affirment donc qu’ils ne sont nullement impliqués dans la reprise de suggestions de rectifications de 1990-1991 au sujet de l’accent circonflexe (et, semble-t-il, de curiosités comme nénuphar et oignon…). L’Académie rappelle qu’en France nul n’a le droit de décréter des changements d’orthographe (aucun texte fondamental de la République ne l’autorise) : elle est « hostile à toute réforme visant à modifier autoritairement l’usage ».
De vives réactions se manifestent de toutes parts – qu’il s’agisse de M. François Bayrou, qui fut ministre de l’Éducation nationale, ou de la rédaction du Canard enchaîné – contre ces propositions qu’une décision arbitraire (émanant d’on ne sait trop qui, car personne, apparemment, n’en revendique clairement la paternité !) voudrait imposer.
Si l’on veut simplifier intelligemment l’orthographe, il faut commencer par supprimer des discordances évidentes qui compliquent inutilement la tâche des enseignants et celle des apprenants, comme on dit maintenant. Même s’il existe en certains cas des explications à l’installation de ces discordances dans la langue, il faut donner la priorité à des unifications utiles et qui sont réellement simplificatrices, et non perturbatrices : accorder chariot sur charrette et compagnie, aligner combattre et combativité, etc.
En revanche, et en me situant sur la même position que l’Académie française, je m’en tiens pour tout le reste à l’orthographe traditionnelle, respectant l’usage suivi par l’immense majorité des francophones. Cela, tant que l’usage, « législateur suprême », n’aura pas évolué… »
https://jeanpierrecolignon.wordpress.com/2016/02/13/le-mot-du-jour-du-samedi-13-fevrier-2016/
et renforcé par son intervention du 25.10.20 :
« Moi qui ai été impliqué directement dans la réflexion sur ce sujet, en tant que membre de la commission dite des « dix experts » réunie par le Premier ministre Michel Rocard, je peux affirmer que cela s’est terminé, en janvier 1991, après quelques retournements de veste et une vive réaction des usagers du français, par : un vote de l’Académie française s’en remettant au « plus grand des grammairiens » : l’usage, et en laissant du temps au temps, et par la publication au Journal officiel, dans la partie dite « documents administratifs », c’est-à-dire des textes mentionnés à titre de documents, justement, et n’ayant aucune valeur légale, des « propositions de modifications de l’orthographe »… »
https://jeanpierrecolignon.wordpress.com/2020/10/25/le-mot-du-jour-du-dimanche-25-octobre-2020-6/
En fait, si les deux sont valables c’est qu’ils n’ont pas le même sens.
De même qu’on peut dire un matin ou une matinée… à part que avec après-midi, qui est une forme invariable parce que locution adverbiale, le suffixe féminisant « ée » induisant la notion de contenance (ex: une cuillère – une cuillérée) ne peut être employé.
Donc, lorsqu’on dit « un après-midi », on désigne le moment temporel dans une journée, quand on dit « une après-midi », on désigne la durée associée à ce moment (comme le confirment vos exemples qui contiennent tous un ou plusieurs termes signifiant la durée associés).
L’emploi de la locution au féminin reste cependant abusif, puisque le suffixe correspondant ne peut lui être attribué correctement, on ne peut pas dire « une après-midiée ».
Midi étant du genre masculin , je ne me pose pas la question ! pour moi , le masculin va de fait … de même , en moins poétique , je dis une autoroute !….
Le matin, la matinée
Bonjour Adrian, il me semble qu’il y a un mot en français pour désigner cet hermaphrodisme genré, relevant à la fois du masculin et d’un feminin. Je l’avais noté un jour dans un carnet mais’ ne parvient pas plus à le trouver. Au plaisir de votre remémoration…
Je ne suis pas d’accord avec l’affirmation suivante : « Cependant, on ne doit pas écrire « ma après-midi » mais « mon après-midi ». En effet, « ma après-midi » serait difficile à prononcer. »
En effet, même si on considère que après-midi est féminin, on doit dire mon après-midi. En effet, en français, le possessif ma devient mon devant un mot féminin début par une voyelle : mon abeille, mon araignée, mon épine, mon aïeule. Cela est certes une affaire d’euphonie, mais c’est une règle grammaticale pas juste parce que ce « serait difficile à prononcer ».
Justement, c’est une règle grammaticale établie pour cette question de prononciation. Mais elle n’est pad propre à l’après- midi.