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Discours indirect libre : définition et exemples

Publié le 17/11/2022 (m.à.j* le 21/08/2024)
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Définition

Le discours indirect libre est un type de discours rapporté. Le narrateur reformule les paroles ou les pensées d’un personnage dans le corps du récit sans que celles-ci soient toujours introduites par un verbe de parole (affirmer, dire, déclarer, demander, etc.) ni par une conjonction de subordination (« que », « si ») comme dans le discours indirect, ni par une ponctuation particulière (tirets et guillemets, voire italique) comme dans le discours direct. Le discours rapporté se « fond » dans le récit, ce qui évite toute coupure avec la narration (on fait « comme si » les paroles ou les pensées étaient intégrées au récit). Le narrateur imite en quelque sorte son personnage, en retranscrivant ses sentiments, ses opinions, ses perceptions. Exemple :

  • Discours direct : « Allons nous cacher ! moi, je refuse d’être arrêté », murmura Valogre.
  • Discours indirect : Valogre murmura qu’ils devaient se cacher car lui refusait d’être arrêté.
  • Discours indirect libre : Quand survint la police, Valogre entra dans un grand état d’agitation. Ils devaient se cacher, il refusait d’être arrêté, lui !

Le discours indirect peut conserver certaines marques du discours direct et du discours indirect. Pour cette raison, on parle parfois d’un hybride entre ces deux types.

Du discours direct, il garde l’expressivité, c’est-à-dire le ton et certains éléments de la ponctuation. Ainsi, pour retranscrire une question, il conserve le point d’interrogation, pour retranscrire une exclamation, il conserve le point d’exclamation, ainsi que les mots phrases et les phrases adverbiales. Le discours indirect libre imite aussi le niveau de langue du personnage.

  • Discours direct : Nico fut plus que sceptique : « L’ami, on peut pas croire un mot de ce que tu racontes. Où est-ce que t’as entendu ça ? Franchement, tu nous prends pour des abrutis ou quoi ! »
  • Discours indirect libre : Non, Nico ne pouvait pas croire un mot de ce qu’il racontait, « l’ami ». Où est-ce qu’il avait entendu ça ? Ils les prenaient pour des abrutis, franchement !

Du discours indirect, il conserve les temps verbaux et les pronoms (la 3e personne notamment). Ce qui est rapporté est une sorte de résumé des paroles ou des pensées du personnage. Le discours indirect libre est parfois précédé par une phrase au discours indirect. Exemple :

  • Discours indirect :  Sa mère lui dit que, quoi qu’il allait faire, il pouvait être sûr qu’elle serait toujours à ses côtés.
  • Discours indirect libre : Quoi qu’il allait faire, elle serait toujours à ses côtés ! ça, il pouvait en être sûr.

L’usage du discours indirect libre

➢ L’usage du discours indirect libre est ancien, mais il est s’est développé notablement chez les auteurs du XIXe siècle, dans certains romans réalistes, ou chez Flaubert (1821 – 1880) et Maupassant (1850 – 1893) où il est abondant. Très souple, il laisse une grande liberté de style au narrateur, qui s’affranchit des lourdeurs du discours indirect (la multiplication des « que » par exemple) et peut ainsi maintenir la dynamique de son récit. Ce type de discours a la vertu de mieux retranscrire la fluidité et la spontanéité qui caractérisent le fil des pensées d’un protagoniste, telles qu’elles se manifestent. On pense en effet « en parlant », et cette parole compte des apostrophes, des exclamations, des interrogations, des mots familiers et argotiques, etc.

  • Valérie ne souvenait plus du chemin. C’était à gauche, croyait-elle… Ou bien à droite ? Toutes ces rues se ressemblaient tellement !

➢ Le discours indirect libre efface en outre la médiation opérée par le narrateur entre les personnages et le lecteur. Ce dernier accède directement à un espace où le narrateur mêle son point de vue à celui des personnages. Le narrateur peut, d’un côté, exposer ses analyses par ses personnages ou, d’un autre côté, placer ses personnages sur le même plan que lui : il les « libère » en perdant son omniscience, il leur confère une pleine consistance et donne illusion au lecteur de la réalité de leur existence et de leur autonomie. Les voix du narrateur et du personnage sont comme « juxtaposées » : le discours indirect libre est souvent qualifié de « polyphonique ».

  • « Une faculté extraordinaire, dont il ne savait pas l’objet, lui était venue. Il se demanda, sérieusement, s’il serait un grand peintre ou un grand poète ; et il se décida pour la peinture, car les exigences de ce métier le rapprocheraient de Mme. Arnoux. Il avait trouvé sa vocation ! Le but de son existence était clair maintenant, et l’avenir infaillible ! ». Dans cet extrait de L’Éducation sentimentale (1869), le narrateur et le personnage semblent parler d’une même voix. Cependant, une discordance est perceptible, parce que le personnage est sincère, tandis que le narrateur semble se moquer de lui. (cf. María Muñoz Romero)

➢ Le discours indirect libre permet aussi de résumer un long propos au sein d’un récit. On parle de discours raconté.

➢ Enfin, il peut permettre au narrateur de citer des paroles dont il ne veut pas prendre la responsabilité, et avec lesquels il place une distanciation critique (dans les articles de presse par exemple). Les propos sont alors placés entre guillemets.

  • Le ministre a tenté de justifier ses choix au cours d’une longue interview. La crise réduisait « toutes ses marges de manœuvres », les partenaires sociaux étaient « butés » et les pays voisins « indifférents ».

Identifier le discours indirect libre

L’identification du discours indirect libre n’est pas toujours aisé. La difficulté réside dans le fait de distinguer le discours du personnage des commentaires du narrateur, parce qu’aucun locuteur n’est introduit. Le narrateur imite certes la parole de son personnage et le fait parler comme s’il énonçait quelque chose à propos de la situation « ici et maintenant », mais conserve la troisième personne et des temps du passé, propres au récit.

Certains indices peuvent toutefois annoncer le changement d’énonciateur. Le discours indirect libre est ainsi souvent signalé par des incises où figurent des verbes de paroles qui servent d’introducteur :

  •  Il avait longtemps prétendu être un grand cavalier, mais cette prétention ne fut pas confirmée par sa démonstration sur le manège. Le cheval était trop raide, disait-il, mal dressé, et n’écoutait pas les ordres.

Le contexte l’annonce souvent. Il fait souvent suite à une phrase au discours indirect.

  • Françoise nous dit qu’il fallait se méfier en amour. Les hommes étaient, on ne pouvait en douter, d’incorrigibles trompeurs, sauf exception, bien sûr !

Il arrive aussi que la narrateur emploie des éléments du discours direct, comme des guillemets ou les deux points, tout en conservant la troisième personne et des temps du passé.

  • Le groupe se pressait pour rentrer. Le patriarche était furieux : « on ne pouvait pas prendre le thé après cinq heures, c’était contraire à tous les usages ! ».

Enfin, on peut se fonder sur les déictiques, c’est-à-dire des termes qui ne peuvent être compris qu’en fonction de la situation de l’énonciation (hier, ici, maintenant, là-bas, déterminants possessifs, etc., termes dont on ne comprend les référence qu’en fonction de la situation du personnage), ainsi que sur des verbes modaux qui expriment un jugement, des expressions affectives, et des élément syntaxiques comme les points d’exclamation et d’interrogation.

  • Richard vint à elle, et lui annonça la nouvelle de ses fiançailles. Son fils adoré, la prunelle de ses yeux, il allait enfin se marier ! elle avait tant attendu ! il devait faire les choses en grand ! On en parlerait sans faute ce soir avec son père, mais était-il d’accord ?