Le mot ghetto vient de l’italien ghetto, « fonderie », dérivé de l’italien ancien ghettare (gettare), « jeter ». C’était un quartier du nord de Venise, sur l’île de Cannaregio, où se trouvaient d’anciennes fonderies, dans lequel les Juifs ont été assignés à résidence à partir du 29 mars 1516, afin que la République puisse les fixer et les contrôler, après une période d’afflux important venant de la péninsule ibérique et de la Terre Ferme. Emmuré, deux portes qui devaient être fermées la nuit sous la surveillance de quatre gardiens y permettaient l’accès. Le reste du quartier était fermé par un canal. Les Juifs devaient en outre porter un signe distinctif, un rond jaune (rouelle), puis un turban ou un chapeau jaune puis rouge et s’acquitter d’un impôt collectif. Si la communauté juive de Venise a prospéré, elle a pu être la victime de vexations ou de rackets. Les Juifs du ghetto ne pouvaient pas avoir de relations charnelles avec les chrétiens, n’avaient aucun droit de participation à la vie publique, devaient subir des augmentations de loyers, ne pouvaient être propriétaires… Toutefois, la communauté juive se vit accorder des privilèges commerciaux.
Les murs du ghetto de Venise ont été abattus en 1797 à l’arrivée des troupes de Napoléon Bonaparte (1769 – 1821), qui mit fin à l’existence de la République de Venise. La ville comptait alors 3000 Juifs. Ces derniers n’ont obtenu l’égalité politique complète qu’à l’intégration de la Vénétie dans le royaume d’Italie (1866).
Le modèle du ghetto de Venise en Italie et en Europe. Le plus célèbre ghetto avec celui de Venise fut celui de Rome, créé par une bulle du 14 juillet 1555 de Paul IV (r. 1555 – 1559) dans le rione Sant’Angelo, en face de l’île Tibérine. L’objectif des papes était ici idéologique : convertir les juifs. Il fut fermé en 1870 quand Rome fut prise par l’armée italienne. Un autre ghetto tristement célèbre fut celui de Varsovie, créé par les Allemands en 1940 et qui rassembla jusqu’à 375 000 personnes, dont la majeure partie fut déportée vers les camps de la mort. Il fut détruit après une insurrection en 1943.
Aujourd’hui, le terme de ghetto est entré, par antonomase, dans le langage commun, pour désigner tous les lieux où une classe socio-culturelle vit à défaut de pouvoir vivre ailleurs, en raison d’une ségrégation raciale de fait, de handicaps sociaux-économiques, etc., comme les quartiers où vivent les populations noires aux États-Unis.
À lire : Claude Cazalé Bérard, Les cinq cents ans du Ghetto de Venise
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