La chanson du vannier | Chanson d’André Theuriet
Brins d’osier, brins
d’osier,
Courbez-vous assouplis sous les
doigts du vannier.
Brins d’osier, vous serez le lit
frêle où la mère
Berce un petit enfant aux sons d’un
vieux couplet :
L’enfant, la lèvre encor toute
blanche de lait,
S’endort en souriant dans sa couche
légère.
Brins d’osier, brins
d’osier,
Courbez-vous assouplis sous les
doigts du vannier.
Vous serez le panier plein de
fraises vermeilles
Que les filles s’en vont cueillir
dans les taillis.
Elles rentrent le soir, rieuses, au
logis,
Et l’odeur des fruits mûrs s’exhale
des corbeilles.
Brins d’osier, brins
d’osier,
Courbez-vous assouplis sous les
doigts du vannier.
Vous serez le grand van où la
fermière alerte
Fait bondir le froment qu’ont battu
les fléaux,
Tandis qu’à ses côtés des bandes de
moineaux
Se disputent les grains dont la terre
est couverte.
Brins d’osier, brins
d’osier,
Courbez-vous assouplis sous les
doigts du vannier.
Lorsque s’empourpreront les vignes
à l’automne,
Lorsque les vendangeurs descendront
des coteaux,
Brins d’osier, vous lierez les
cercles des tonneaux
Où le vin doux rougit les douves et
bouillonne.
Brins d’osier, brins
d’osier,
Courbez-vous assouplis sous les
doigts du vannier.
Brins d’osier, vous serez la cage
où l’oiseau chante,
Et la nasse perfide au milieu des
roseaux,
Où la truite qui monte et file entre
deux eaux,
S’enfonce, et tout à coup se débat
frémissante.
Brins d’osier, brins
d’osier,
Courbez-vous assouplis sous les
doigts du vannier.
Et vous serez aussi, brins
d’osier, l’humble claie
Où, quand le vieux vannier tombe et
meurt, on l’étend
Tout prêt pour le cercueil. – Son
convoi se répand,
Le soir, dans les sentiers où verdit
l’oseraie.
Brins d’osier, brins
d’osier,
Courbez-vous assouplis sous les
doigts du vannier.
Revue des deux mondes
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