Odelette | Poème d’Henri de Régnier
Voir ici une anthologie des poèmes de la langue française
Un petit roseau m’a
suffi
Pour faire frémir l’herbe
haute
Et tout le pré
Et les doux saules
Et le ruisseau qui chante aussi
;
Un petit roseau m’a suffi
À faire chanter la forêt.
Ceux qui passent l’ont
entendu
Au fond du soir, en leurs
pensées,
Dans le silence et dans le
vent,
Clair ou perdu,
Proche ou lointain…
Ceux qui passent en leurs
pensées
En écoutant, au fond
d’eux-mêmes,
L’entendront encore et
l’entendent
Toujours qui chante.
Il m’a suffi
De ce petit roseau cueilli
À la fontaine où vint
l’Amour
Mirer, un jour,
Sa face grave
Et qui pleurait,
Pour faire pleurer ceux qui
passent
Et trembler l’herbe et frémir l’eau
;
Et j’ai, du souffle d’un
roseau,
Fait chanter toute la
forêt.
Les Jeux rustiques et divins, La corbeille des heures, 1897
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