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Ne pas se moucher du coude : dĂ©f. & origine (expression) đŸ€§
ne pas se moucher du coude definition origine signification expression

Publié le 25/07/2021
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Définition

Ne pas se moucher du coude signifie : se croire important, ĂȘtre prĂ©tentieux, se faire valoir. 

Synonymes

ne pas se moucher du pied ; péter plus haut que son cul.

Ne pas se moucher du coude : origine de l’expression

L’origine de cette expression n’est pas certaine. Le « pied » remplaçait autrefois le « coude », avec un sens diffĂ©rent. Quelqu’un qui ne se mouchait pas du pied Ă©tait habile, ne se laissait pas berner facilement, n’était pas ignorant. Cette expression peut donc ĂȘtre comprise dans son sens littĂ©ral : une personne qui ne se mouche pas du pied est habile parce qu’elle utilise ses mains au lieu de ses pieds, avec lesquels cette entreprise serait dĂ©licate ; elle n’est pas ignorante parce qu’elle connaĂźt les usages, etc.

Sainct Barthelemey s’est essayĂ© plusieurs fois Ă  l’empoisonner, mesme dans Paris, & pour ce faire, s’est desguisĂ© en toutes les sortes qu’il a peu, toutesfois quand s’est venu Ă  l’approcher, a toufiours eu crainte d’estre descouvert : car il avait affaire Ă  un homme, qui ne se mouche pas du pied.

Legende de Domp Claude de Guyse, abbé de Cluny, 1581

Dans ce sens, on comprend que cette expression se soit enrichie d’une nouvelle forme avec « coude », qui existe peut-ĂȘtre dĂšs le XVIIe siĂšcle. On la trouve par exemple dans un dictionnaire français – anglais du XVIIe siĂšcle, traduite par « he is no fool », « il n’est pas idiot ».

— Moi, madame ! Quand j’aurai dit que je fĂȘte une des patronnes de madame, si la police envoyait trente gendarmes pour dĂ©ranger quelque chose, soyez sĂ»re qu’avant d’ĂȘtre arrivĂ©s Ă  la croix rouge qui est au milieu du village, pas un d’eux ne serait Ă  cheval. Ils ne se mouchent pas du coude, non, les habitants de Sacca ; tous contrebandiers finis et qui adorent madame.

Stendhal, La Chartreuse de Parme

De cette idĂ©e d’habilitĂ© et d’intelligence, le sens de cette expression a glissĂ© vers « ne pas faire les choses Ă  moitiĂ© », « ĂȘtre fort et douĂ© », puis vers la prĂ©tention : 

– CrĂ© nom, voilĂ  un petit vin qu’on s’en ferait pĂ©ter la sous-ventriĂšre, dit le cuirassier en faisant claquer sa langue contre son palais !
– Je vous crois ! Monsieur dit toujours que c’est son meilleur, du Corton de premiùre.
– Vot’ bourgeois ne se mouche pas du pied. 

Littoral-mondain, 1901

« Notre grande victoire sur le Racing, a dĂ©clarĂ© M. Alexander W. Neumann, prĂ©sident du First Vienna Football Club, nous a dĂ©cidĂ©s Ă  lancer un dĂ©fi Ă  Arsenal. Nous dĂ©sirerions jouer en Angleterre, en laissant Ă  Arsenal le soin de fixer la date. 
« Nous sommes certains que le match avec Arsenal deviendra un event classique dans le football anglais. »
Comme l’on dit vulgairement, M. Neumann ne se mouche pas du pied. Les Britanniques n’attendent pas qu’on leur amĂšne du continent des « events classiques ». 

L’Intransigeant, 4 dĂ©cembre 1930

MĂȘme chose pour « ne pas se moucher du coude » :

La Lanterne, dans son seul numĂ©ro d’hier, mettait en scĂšne un baron, un comte, un prince et un gĂ©nĂ©ral. 
Excusez du peu. 
Nos bons jacobins ne se mouchent pas du coude. 

L’Univers, 17 janvier 1897

En dix ou douze lignes pĂ©nibles, le citoyen Sphincter a trouvĂ© le moyen de se comparer Ă  Jules Guesde. Le bougre ne se mouche pas du coude. 

Les Hommes du jour, 24 janvier 1914

L’origine de cette expression peut aussi ĂȘtre retracĂ©e depuis le sens figurĂ© du verbe « moucher », , au sens de « remettre quelqu’un Ă  sa place » :

Il savait oĂč Ă©tait la chambre, il s’insinua dans le couloir. Il entendit Ă  l’intĂ©rieur la voix de NoĂ©mi. Elle disait au valet :

— Zut et zut ! Il m’embĂȘte !
 Vous avez bien fait de le moucher, ce serin !


Rolland, L’Âme enchantĂ©e

Ce sens vient de l’emploi ancien du verbe « moucher » pour « ĂŽter le bout du lumignon de la chandelle qui l’empĂȘche d’éclairer » (DMF), qui a donnĂ© « dĂ©capiter ». Ne pas se laisser moucher du pied, c’était donc « ĂȘtre adroit », « ne pas se laisser berner facilement », parce que la personne en question ne se laissait « remettre Ă  sa place » avec les pieds (symboliquement), il fallait utiliser les mains, faire de vrais efforts. On peut aussi se demander si cette expression vient du jeu de paume Ă  partir de cet exemple. Mais cela est improbable.