Qu’est-ce que l’OTAN ?
OTAN est un acronyme qui signifie : Organisation du traité de l’Atlantique Nord. L’acronyme du nom de l’organisation en anglais est NATO (North Atlantic Treaty Organization). L’OTAN est une alliance militaire entre plusieurs États membres. Ces États sont situés en Amérique du Nord et en Europe.
Selon l’article 5 de son traité fondateur, le traité de l’Atlantique Nord, signé le 4 avril 1949 à Washington (on parle aussi du traité de Washington), les pays signataires (les États alliés qui font partie de l’OTAN) s’engagent à se porter assistance si le territoire de l’un d’entre eux, situé en Amérique du Nord ou en Europe, est envahi (principe de la « défense collective »).
Cela signifie qu’ils s’engagent, s’ils l’estiment nécessaire, à entrer en guerre contre l’État qui agresse l’un des alliés. Mais cet engagement n’est pas automatique : l’entrée en guerre des alliés contre l’agresseur est éventuelle, même si l’on suppose que dans le cas d’une agression par un État étranger à l’alliance d’un État allié, tous les alliés entreront en guerre contre l’État agresseur, ou au moins le principal d’entre eux, les États-Unis d’Amérique.
Les parties conviennent qu’une attaque armée contre l’une ou plusieurs d’entre elles survenant en Europe ou en Amérique du Nord sera considérée comme une attaque dirigée contre toutes les parties, et en conséquence elles conviennent que, si une telle attaque se produit, chacune d’elles, dans l’exercice du droit de légitime défense, individuelle ou collective, reconnu par l’article 51 de la Charte des Nations Unies, assistera la partie ou les parties ainsi attaquées en prenant aussitôt, individuellement et d’accord avec les autres parties, telle action qu’elle jugera nécessaire, y compris l’emploi de la force armée, pour rétablir et assurer la sécurité dans la région de l’Atlantique Nord.
Toute attaque armée de cette nature et toute mesure prise en conséquence seront immédiatement portées à la connaissance du Conseil de Sécurité. Ces mesures prendront fin quand le Conseil de Sécurité aura pris les mesures nécessaires pour rétablir et maintenir la paix et la sécurité internationales.
Article 5 du traité de l’Atlantique Nord
Chaque État membre conserve son armée et le commandement de son armée, mais les politiques de défense des États membres sont étroitement liées.
L’OTAN est aussi une alliance politique entre des États qui estiment que les principes qui les animent sont proches. Le préambule du traité déclare ainsi que les États membres sont :
Déterminés à sauvegarder la liberté de leurs peuples, leur héritage commun et leur civilisation, fondés sur les principes de la démocratie, les libertés individuelles et le règne du droit.
Les 31 membres de l’OTAN
L’alliance compte 30 pays membres en 2022. Les dates d’adhésion figurent entre parenthèses.
- en Amérique du Nord :
- États-Unis (1949) ;
- Canada (1949) ;
- pays qui sont aussi membres de
l’Union européenne :
- Belgique (1949) ;
- Danemark (1949) ;
- France (1949) ;
- Italie (1949) ;
- Luxembourg (1949) ;
- Pays-Bas (1949) ;
- Portugal (1949) ;
- Grèce (1952) ;
- Allemagne (1955 pour l’Allemagne de l’Ouest, ou RFA) ;
- Espagne (1982) ;
- Hongrie (1999) ;
- Pologne (1999) ;
- République Tchèque (1999) ;
- Bulgarie (2004) ;
- Estonie (2004) ;
- Lettonie (2004) ;
- Lituanie (2004) ;
- Roumanie (2004) ;
- Slovaquie (2004) ;
- Slovénie (2004) ;
- Croatie (2009) ;
- Finlande 2023) ;
- pays non-membres de l’UE :
- Islande (1949) ;
- Norvège (1949) ;
- Royaume-Uni (1949) ;
- Turquie (1952) ;
- Albanie (2009) ;
- Monténégro (2017) ;
- Macédoine du Nord (2020).
L’Alliance est ouverte à l’adhésion d’autres États de la région. Selon l’article 10 du traité de l’Atlantique Nord :
Les parties peuvent, par accord unanime, inviter à accéder au Traité tout autre Etat européen susceptible de favoriser le développement des principes du présent Traité et de contribuer à la sécurité de la région de l’Atlantique Nord.
Du fait de leur politique de neutralité, l’Autriche, la Finlande, l’Irlande, la Suède et la Suisse ne font pas partie de l’OTAN.
Structure
La structure de l’OTAN, complexe, se divise en un volet civil et un volet militaire. Occuper des fonctions au sein des volets civil et militaire de l’OTAN est considéré par les États membres comme un vecteur de leur influence.
Les principales instances du volet civil
Le représentant de l’OTAN et son porte-parole auprès des médias et du grand public est le secrétaire général. Il est traditionnellement européen. C’est le plus haut fonctionnaire civil de l’organisation. Sa fonction est politique : il a pour rôle de coordonner les États membres afin d’éviter les conflits pendant le processus de prise de décision. Il est désigné pour 4 ans par consensus entre les États alliés. Il est assisté par un secrétaire générale délégué.
Le secrétaire général préside de le conseil de l’Atlantique nord (CAN). Ce conseil est le principal organe politique de l’alliance. Chaque État membre y est représenté par un ambassadeur ou un représentant permanent. Les décisions y sont prises par consensus sous l’impulsion du secrétaire général. Une « procédure du silence » permet d’accélérer la prise de décision : un projet de texte proposé par le secrétaire général ou par le président d’un conseil délibératif est considéré comme adopté si aucun État membre ne s’y oppose avant un délai prédéterminé.
L’habitude prise par les États membres de ne pas afficher leurs désaccords s’explique par la volonté des alliés de ne pas donner à l’extérieur une image de désunion et, pour chaque État membre, de ne pas avoir l’air de faire partie des perdants. Cette opacité facilite la prise de décision.
Le CAN se réunit pour discuter des questions de sécurité qui touchent chaque État membre. Il dispose de plusieurs formations où la décision prise a toujours la même valeur : il se réunit soit entre représentants permanents (le plus souvent), soit avec les ministres des Affaires étrangères et de la Défense de chaque État membre, soit, pour les décisions les plus importantes, avec les dirigeants de chaque État
Le secrétaire général préside aussi d’autres hauts comités, comme le Groupe des plans nucléaires, ou le Comité des plans de défense.
Le volet militaire
Le volet militaire de l’OTAN est ce qui est entendu par l’expression « commandement intégré », duquel la France s’est retiré en 1966 sous la présidence de Charles de Gaulle, avant de le réintégrer en 2009 sous la présidence de Nicolas Sarkozy.
Les instances militaires de l’OTAN ont été modifiées depuis sa création.
L’Alliance ne possède que très peu de forces en propre. Ce sont les alliés qui mettent à la disposition de l’OTAN des troupes, du matériel, sous l’égide d’un commandement unifié.
La plus haute instance militaire de l’OTAN est le Comité militaire. Il est composé d’un état-major international. Le Comité militaire donne son avis au conseil de l’Atlantique Nord et au Groupe des plans nucléaires sur les grandes orientations et la stratégie militaires. En d’autres termes, il peut recommander des mesures qu’il estime nécessaire pour la défense de l’alliance. Son avis est requis avant l’autorisation d’opérations militaires par le CAN. Ces militaires informent des civils.
Le président du Comité militaire est la plus haute autorité militaire de l’OTAN.
Il réunit une fois par semaine les représentants militaires permanents, et trois fois par an au moins les chefs d’état-major des armées.
La France en avait été absente de 1966 à 1995.
Le Groupe des plans nucléaires travaille sur la politique nucléaire des pays de l’OTAN. La France n’en est pas membre. Il a été formé après son retrait de commandement intégré en 1966.
Le Comité militaire supervise le SACEUR et le SACT.
SACEUR signifie Supreme Allied Commander Europe, c’est-à-dire le Commandant suprême des forces alliées en Europe. Ce SACEUR dirige le Commandant allié opération (le ACO, Allied Command Operations), qui est chargé de la planification et de l’éxécution des opération militaires de l’OTAN. Cet officier est traditionnellement américain. Il est nommé par le président des États-Unis, confirmé par le Sénat des États-Unis puis par le Conseil de l’Atlantique Nord. Il est responsable devant le Comité militaire.
Le SACEUR siège à Casteau, près de Mons, en Belgique, au SHAPE (Supreme Headquarters Allied Powers Europe, Grand Quartier général des puissances alliées en Europe).
En cas de conflit, le SACEUR prendrait la direction des opérations militaires de l’OTAN. Il a pour responsabilité de prendre toutes les mesures militaires pour préserver ou rétablir la sécurité des territoires de l’Alliance.
SACT signifie Supreme Allied Commander Transformation, c’est-à-dire le commandant suprême allié transformation. Ce SACT dirige le Commandement allié transformation (ACT, Allied Command Transformation). Cet officier est français depuis 2009, date de réintégration par la France du commandement intégré. Il est responsable devant le Comité militaire.
Le SACT siège à Norfolk, en Virginie, aux États-Unis.
Il est chargé de la transformation des capacités des armées de l’OTAN, d’améliorer leur interopérabilité (la possibillité d’opérer ensemble) et de mettre à jour la doctrine et les concepts de ces armées.
Des influences informelles
Plus un pays a d’officiers, plus il pourra en placer au sein de l’OTAN. Le poids de chaque État membre n’est donc pas égal.
En outre, des groupes informels pèsent sur le fonctionnement de l’OTAN. C’est le cas par exemple du « QUAD », qui réunit les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Allemagne et la France.
Courte histoire de l’OTAN
L’idée d’une alliance atlantique peut être retracée dès la fin de la Première Guerre mondiale. Cependant, la cause immédiate qui est à l’origine de la création de l’OTAN est l’émergence de la guerre froide, c’est-à-dire le long antagonisme qui a opposé le « bloc de l’Ouest », avec à sa tête les États-Unis d’Amérique, au « bloc de l’Est », avec à sa tête l’URSS (Union des républiques socialistes soviétiques, ou « Union soviétique »), de la fin de la Seconde Guerre mondiale, en 1945, à la chute de l’URSS, en 1991.
Dès mars 1947, la France et le Royaume-Uni, avait formé, par le traité de Dunkerque, une alliance contre une éventuelle résurgence de l’Allemagne, défaite en 1945. En mars 1948, un an avant la signature du traité de l’Atlantique Nord, la France, le Royaume-Uni et les États du Bénélux (Belgique, Luxembourg et Pays-Bas) avaient signé le traité de Bruxelles, qui prévoyait une assistance mutuelle en cas d’agression extérieure, c’est-à-dire de l’Union soviétique, dont des troupes stationnaient dans les pays de l’Europe centrale et orientale (à l’est de l’Allemagne notamment, qui allait devenir la RDA en 1949).
Au cas où l’une des Hautes Parties Contractantes serait l’objet d’une agression armée en Europe, les autres lui porteront, conformément aux dispositions de l’article 51 de la Charte des Nations Unies, aide et assistance par tous les moyens en leur pouvoir, militaires et autres.
Article IV
Cette clause a été partiellement reprise à l’article 42-7 du Traité sur l’Union européenne
La progression de la menace soviétique pousse ces États à demander aux États-Unis, seuls détenteurs de la bombe nucléaire, une plus grande implication dans la défense de l’Europe occidentale. En effet, en février 1948, avec l’aide soviétique, le parti communiste prend le contrôle de la Tchécoslovaquie (le « coup de Prague »). Le « blocus de Berlin » par l’URSS commence le 24 juin de la même année. Des menaces sur la Grèce, la Turquie ou la Norvège inquiètent aussi.
Le traité de Washington du 4 avril 1949, qui compte quinze article, donne naissance à l’Alliance atlantique. Il englobe une zone plus large que les cinq pays du traité de Bruxelles. Il compte au départ douze signataires :
les États-Unis, le Canada, la France, le Royaume-Uni, le Benelux, l’Italie, la Norvège, le Danemark, l’Islande et le Portugal.
La Grèce et la Turquie ont rejoint l’OTAN en 1952. L’Allemagne de l’ouest (RFA), qui a été autorisée à se réarmer en 1954, entre dans l’OTAN en 1955.
Une grande partie de l’Europe occidentale est ainsi placée sous la protection des États-Unis et de sa bombe nucléaire, bien que l’assistance militaire édictée par l’article 5 du traité ne soit pas automatique : les États alliés ne sont pas contraints d’entrer en guerre contre l’agresseur.
Pour résumer selon une célèbre formule attribuée à de Lord Ismay, premier secrétaire général de l’organisation (1952 – 1957), l’OTAN avait pour but de :
Keep Russians out, Americans in, and Germans down
Garder les Russes [les Soviétiques] dehors, les Amériques dedans [en Europe], et les Allemands à terre
À partir des années 1950, les structures instituées par le traité de Bruxelles sont aspirées dans l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord. L’OTAN est notamment doté d’un commandement intégré, dont le QG est au SHAPE, basé à Fontainebleau puis à Mons à partir de 1966. En réponse au réarmement de la RFA et à la création de l’OTAN, l’URSS a organisé son bloc, en 1955, par la création d’une alliance militaire et économique, le pacte de Varsovie.
Le succès de l’OTAN
L’OTAN a fait la preuve de dissuasion puisqu’elle n’est jamais intervenu militairement pendant la guerre froide. La première invocation de l’article 5 a été faite en 2001, bien après la fin de la guerre froide, à la suite des attentats du 11 septembre qui ont frappé les États-Unis. Sous mandat de l’ONU, l’OTAN a dirigé la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) en Afghanistan (à partir de 2003), sa première opération « hors zone ».
Bien que le traité de Washington prévoyait, par son article 13, l’entrée en vigueur du traité pour vingt ans et la possibilité, pour chaque État, de faire cesser sa participation après une procédure d’un an, l’OTAN existe toujours aujourd’hui, sans qu’aucun État ne s’en soit retiré. Au contraire, l’alliance existe toujours malgré la disparition du « bloc de l’Est » et de l’URSS, et s’est élargi à d’anciens pays de ce bloc.
Sa durée de vie et son extension sont exceptionnelles. Quand la majorité des alliances dure en moyenne une quinzaine d’années et rassemblent deux ou trois membres, l’OTAN compte 30 membres, sans défection, et existe depuis 73 ans.
Charles-Philippe David et Olivier Schmitt, auteurs de La Guerre et la Paix, expliquent ce caractère exceptionnel par plusieurs facteurs.
Cette pérennité serait due en premier lieu à l’interdépendance grandissante des États en matière de sécurité, et à la possibilité de confier la charge de leur défense à d’autres : les États-Unis, en premier lieu, sont capables de projeter facilement leur armée grâce au développement des porte-avions et des armes nucléaires. Certains États ont tout intérêt à rejoindre une alliance pour convaincre des alliés d’en faire plus (de développer une puissante armée), pour qu’ils puissent réduire leur budget militaire pour le consacrer à des éléments plus porteurs électoralement. En d’autres termes, certains État se comportent comme des « passagers clandestins ». Naît de là la question récurrente du « partage du fardeau », réclamé par les États-Unis, très ouvertement par le président des États-Unis Donald Trump (2017 – 2021) notamment, c’est-à-dire un plus gros effort budgétaire des États européens pour assurer leur défense.
Elle s’explique en second lieu par des facteurs plus réalistes : les États de l’ancien bloc communiste ont intérêt à rejoindre l’OTAN par crainte d’une éventuelle réémergence géopolitique de la Russie. Les projets d’extension de l’OTAN peuvent être à l’origine de conflits avec la Russie, comme en Géorgie (2008) et en Ukraine (en cours).
Enfin, le succès de l’OTAN peut s’expliquer par des motifs idéologiques : l’OTAN représente un « club » ou une « communauté de nations » qui partagent des principes politiques et qui exerce à ce titre une certaine attraction politique, de la même manière que l’Union européenne.
L’Otan et l’Union européenne
Selon les textes, l’Union européenne a pour vocation de développer une défense commune. Ainsi, selon l’article 24 du traité sur l’Union européenne :
La compétence de l’Union en matière de politique étrangère et de sécurité commune couvre tous les domaines de la politique étrangère ainsi que l’ensemble des questions relatives à la sécurité de l’Union, y compris la définition progressive d’une politique de défense commune qui peut conduire à une défense commune.
Cependant, bien que la France soit traditionnellement la principale avocate d’une politique européenne de défense commune, il n’y a pas de de découplage d’un système comme celui constitué par l’OTAN à l’échelle de l’UE seule. Il n’y a pas non plus de véritable armée commune de l’Union européenne.
La défense des États de l’UE, et de l’Europe en général, repose sur l’OTAN. Aucun n’État ne souhaite réellement renoncer à l’OTAN pour sa politique de défense.
L’OTAN est d’ailleurs inscrite au sein même du traité sur l’Union européenne :
La politique de l’Union au sens de la présente section n’affecte pas le caractère spécifique de la politique de sécurité et de défense de certains États membres, elle respecte les obligations découlant du traité de l’Atlantique Nord pour certains États membres qui considèrent que leur défense commune est réalisée dans le cadre de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) et elle est compatible avec la politique commune de sécurité et de défense arrêtée dans ce cadre.
L’aliéna 7 du même article reconnaît même le caractère fondamental de l’OTAN pour certains États membres de leur défense collective :
Les engagements et la coopération dans ce domaine demeurent conformes aux engagements souscrits au sein de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord, qui reste, pour les États qui en sont membres, le fondement de leur défense collective et l’instance de sa mise en œuvre.
À lire
- Maxime Lefebvre, La Politique étrangère européenne
- Georges-Henri Soutou, La guerre froide
- Amélie Zima, L’OTAN
La Finlande est devenue le 31ème membre en 2023