DĂ©finition
Un lit de Procuste signifie : un cadre contraignant et uniformisant, des rĂšgles trop strictes ou trop tyranniques, une approche rĂ©ductrice des choses. On peut par exemple dire : « câĂ©tait un ĂȘtre profondĂ©ment original, qui refusait toutes les compromissions et ne pouvait se rĂ©soudre Ă se glisser dans le lit de Procuste des normes dĂ©bilitantes de la sociĂ©tĂ© ». Câest une expression dont lâusage est littĂ©raire ou journalistique ; elle est rare et rarement comprise.
Un lit de Procuste : origine de lâexpression
Cette expression se rĂ©fĂšre Ă la mythologie grecque. Procuste (du grec ProkroustĂȘs, « celui qui se jette sur », « qui Ă©tire avec violence ») est un personnage secondaire de la mythologie grecque. Fils de PosĂ©idon, câest un brigand de lâAttique qui capture ses victimes et les fait allonger sur un lit : si elles sont plus grandes que les dimensions du lit, il coupe les extrĂ©mitĂ©s qui dĂ©passent, et si elles sont plus petites, ils martĂšlent leurs jambes jusquâĂ ce quâelles sâĂ©tirent (de lĂ son surnom). Il est tuĂ© par ThĂ©sĂ©e, hĂ©ros redresseur de torts. On trouve ce rĂ©cit chez plusieurs Ă©crivains antiques. Exemples :
ThĂ©sĂ©e Ă©gorgea ensuite, prĂšs dâEleusis, Cercyon, qui luttait avec les passants, et assommait les vaincus. AprĂšs cela, il tua Procruste, qui demeurait Ă Corydalle, dans lâAttique. Procruste contraignait les voyageurs de se jeter sur un lit ; il leur coupait les membres trop grands et qui dĂ©passaient le lit, et Ă©tirait les pieds de ceux qui Ă©taient trop petits. Câest pour cette raison quâon lâappelait Procruste.
Diodore de Sicile, BibliothĂšque historique, IV, 59
X. [11] (1) ArrivĂ© Ă Ăleusis, il vainquit Ă la lutte Cercyon dâArcadie, et le tua. Passant de lĂ Ă ĂrinĂ©os, qui en est peu Ă©loignĂ©e, il fit mourir DamastĂšs, quâon appelait aussi Procuste, en lâallongeant Ă la mesure de son lit, comme il y forçait lui-mĂȘme ses hĂŽtes. En cela il imitait HĂ©raclĂšs, (2) qui faisait souffrir Ă ses agresseurs le mĂȘme supplice quâils lui avaient destinĂ©.
5. Le CĂ©phise a son cours beaucoup plus rapide Ă Ăleusis que dans le reste de lâAttique. On donne le nom dâErinĂ©um (le figuier sauvage) Ă un endroit voisin par oĂč Pluton descendit, dit-on, aux enfers aprĂšs avoir enlevĂ© Proserpine (PersĂ©phone). Câest aussi auprĂšs du CĂ©phise que ThĂ©sĂ©e tua le brigand PolypĂ©mon, surnommĂ© Procruste.
« Un lit de Procuste » dĂ©signe donc des rĂšgles tyranniques ou un cadre trop rigide parce que les individus sont contraints de sâadapter Ă ces rĂšgles ou Ă ce cadre, au prix dâune mutilation, si elle nâest pas physique, au moins morale.
Cette expression peut-ĂȘtre repĂ©rĂ©e Ă partir de 1760 en français, mais elle semble venir de lâitalien (letto di Procuste), peut-ĂȘtre depuis Tolomei ou depuis Muratori. On trouve plusieurs fois lâidĂ©e que la forme poĂ©tique du sonnet est similaire au lit de Procuste :
- Claudio Tolo mei havesse ragione di dire cheâl sonetto era simile al letto di Procuste. (Stefano Guazzo, 1690)
On trouve aussi lâexpression en anglais (Procustesâ Bed) dans les Catoâs Letters (1720 â 1723) :
- What is the Inquisition, what is Tyranny, and what is any extravagant Power, but Procustesâs Bed ?
Cette expression sâest surtout diffusĂ©e au XIXe siĂšcle. Elle est enregistrĂ©e par le Dictionnaire de lâAcadĂ©mie française Ă partir de sa 7e Ă©dition (1878). Elle dâusage plus rare aujourdâhui, mais on la trouve assez souvent dans les articles de presse.
Exemple
Empereur NapolĂ©on ne commit pas la faute de beaucoup dâhommes dâĂ©tat, de vouloir assujettir la nation Ă une thĂ©orie abstraite, qui devient alors, pour un pays, comme le lit de Procuste, il Ă©tudia, au contraire, avec soin le caractĂšre du peuple français, ses besoins, son Ă©tat prĂ©sent.
Bonjour, câest assez compliquĂ© Ă placer dans une conversation je trouve !
câest plus courant Ă lâĂ©crit
Merci đ