Définition
Se croire sorti de la cuisse de Jupiter signifie : se croire remarquable, se croire exceptionnel, se croire supérieur aux autres.
Exemples
- Il nous parle à tous comme à des valets, il se croit plus beau, plus grand, plus intelligent que les autres, et s’imagine être sorti de la cuisse de Jupiter !
- La plus grande louange que puisse décerner le peuple français à un individu est : « Il n’est pas fier », c’est-à-dire : « Il ne se hausse pas du col, il est simple et bon enfant, il ne se croit pas sorti de la cuisse de Jupiter tout instruit qu’il est il ne méprise personne. » (Jean Dutourd, De la France considérée comme une maladie)
Se croire sorti de la cuisse de Jupiter : origine de l’expression
Se croire sorti de la cuisse de Jupiter (Zeus pour les Grecs), c’est se croire fait de la même chair qu’un dieu, et pas n’importe quel dieu, le roi des dieux. De là l’idée de se croire exceptionnel. La mythologie grecque raconte que Zeus a enfanté pendant plusieurs mois, dans sa cuisse, son fils Dionysos (Bacchus pour les Romains). Le Pseudo-Apollodore (IIe siècle ap. J.-C.) explique l’histoire ainsi :
Jupiter [Zeus] étant amoureux de Sémélé, allait coucher avec elle, à l’insu de Junon [Héra]. Sémélé trompée par la déesse, demanda à Jupiter qu’il vint chez elle, tel qu’il était lorsqu’il alla demander Junon en mariage ; comme il s’était engagé à faire ce qu’elle lui demanderait, et qu’il ne pouvait révoquer sa promesse, il entra dans sa chambre sur un char, et accompagné de foudres, d’éclairs et de tonnerre ; la frayeur fit perdre connaissance à Sémélé, et, enceinte de six mois, elle accoucha d’un enfant, que Jupiter enleva sur le champ du milieu des flammes, et qu’il cousit dans sa cuisse. Les autres filles de Cadmus répandirent le bruit que Sémélé s’était laissée corrompre par un homme, et qu’elle avait été foudroyée pour avoir mis cela sur le compte de Jupiter. Ce dieu ayant décousu sa cuisse, au bout des neuf mois, en tira Bacchus, et le donna à Mercure [Hermès], qui le porta à Ino et à Athamas, et les engagea à l’élever comme une fille.
Il existe cependant plusieurs versions de cette fable. L’expression, moderne, « se croire sorti de la cuisse de Jupiter », semble prendre forme dans la deuxième moitié du XIXe siècle :
- Remarquez ici que certain proverbe qui a cours parmi nous dit, en parlant d’un homme orgueilleux, qu‘il se croit sorti de la cuisse de Jupiter. (Le Causeur universel, 1 avril 1856)
- Et quant à ce commissaire à poigne, ne serait-ce pas un bien de lui rappeler qu’il n’est pas sorti de la cuisse de Jupiter ? (Le Rappel de la Provence, 15 novembre 1869)
- À notre époque essentiellement bourgeoise, c’est à qui affectera des allures de noblesse. Chacun veut être sorti de la cuisse de Jupiter ; on excelle dans l’art de défigurer un nom roturier et de lui donner un tour quelque peu aristocratique […] (Théodore Pein, Lettres familières sur l’Algérie, 1871)
- Comme robin, il est sans pitié pour le pauvre monde ; comme gentilhomme, il est orgueilleux et se croit sorti de la cuisse de Jupiter […] (Alfred Assolant, Le Seigneur de Lanterne, 1874)
Pour Alain Rey et Sophie Chantreau (Dictionnaire d’expressions et locutions), cette expression serait la transformation d’un vieux proverbe, « ne pas issir [sortir] de l’orine du père », orine signifiant origine, mais aussi urine. Le TLFi évoque d’autres expressions, « se croire sorti de la cuisse du pape », « se dire noble comme la cuisse d'(à) Abraham », absentes de l’usage.
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