Orthographe
On écrit : tout un chacun. Cette locution est un pronom. On la relève surtout à partir du XIXe siècle. Comme le remarque Le Bon Usage (750, a), ce pronom fait l’objet de jugements contradictoires sur son statut et son élégance. Mais on le rencontre souvent, aussi bien à l’écrit (dans la littérature notamment) qu’à l’oral. Ce pronom peut faire figure de bizarrerie grammaticale, qui associe des termes qui peuvent être considérés comme redondants (tout & chacun) ou contradictoires (« tout » renvoie à tous les éléments de manière indifférenciée, « chacun » renvoie quant à lui à tous les éléments spécifiques les uns vis à vis des autres, il distribue).
Il fait parfois l’objet d’études approfondies, qui essaient de montrer qu’elle n’est pas un simple synonyme de « n’importe qui » ou de « tout le monde ». Dans « tout un chacun », contrairement à dans « tout le monde », resterait l’idée que chaque comparé serait plus considéré, suivant un processus plus scrupuleux.
- Ce pronom indéfini est souvent employé avec « comme ».
- Il vient remplacer une forme ancienne, « un chacun », aujourd’hui sorti d’usage.
On trouve chez Gide « de tous et de chacun » :
Et quand on a bu à la santé de tous et de chacun des convives, Jef Last se lève et , en russe , propose de vider un verre au triomphe du Front rouge
Retour de l’U.R.S.S., 1937
À lire ici : « tant s’en faut » ou « loin s’en faut » ?
Exemples avec « tout un chacun »
En conséquence, nous étant rendu sur ledit Trottoir Roulant, et étant parvenu avenue de La Motte-Picquet, devant l’immeuble numéroté 5 bis, nous avons nettement distingué, au fond d’un appartement, révélé à tout un chacun par l’écartement d’une croisée grande ouverte, une sorte de sphère imparfaite, fendue dans le sens de la hauteur […]
— Je vous demande pardon, monsieur. Tout à l’heure, chez le boucher, Mlle Rouzaire le racontait à tout un chacun, et je l’ai entendue.
Le moral des chefs d’entreprise est bon, voire très bon : comme tout un chacun, ils espèrent tourner la page de la pandémie.
Tout à chacun
« Tout à chacun » est peut-être une variante régionale ou québécoise, ou alors une variante née d’une confusion entre la prononciation de « un » et de « à ». Cette forme déviée est étonnamment courante, même dans des publications académiques :
Tout à chacun peut désormais interpeller le distributeur sur les plateformes, les phénomènes de buzz donnent voix au chapitre aux plaintes qui était autrefois condamnées à l’anonymat.
S’il ne faut peut-être pas y voir l’objet d’une machination ou d’une conspiration, reste que tout à chacun semble y trouver son compte.
Timothée Jobert, Champions noirs, racisme blanc
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